A la retraite de saint Médard, l'Église de Saint-Quentin qui n'avait rien perdu de son importance religieuse, continua de se choisir un chef désigné sous différents noms. Les premiers sont connus sous le nom d'abbés. D'autres y joignirent la qualité de comte ; de sorte qu'ils étaient abbés-comtes, réunissant le gouvernement temporel et le gouvernement spirituel.

Parmi tous ceux qui se sont succédés à la tête de notre région, citons :

GUINTARD (mort en 833) - L'administration de Guintard n'a laissé aucun souvenir ; on constate seulement sa présence à l'Assemblée tenue par Charlemagne dans son château de Quierzy. En mémoire de sa générosité et de ses bienfaits, Charlemagne a été regardé comme le principal fondateur de notre église, et chaque année on y célèbre sa fête, le 29 janvier.

ADELARD (mort en 864) - Neveu de Charles-le-Chauve par le sang et son oncle par Ermantrude, épouse de Charles. Charles-le-Chauve visita, en 845, l'Auguste de Vermandois et ce fut en sa présence que le corps de saint Cassien fut placé dans un tombeau en marbre.

BAUDOIN Bras-de-Fer, Comte de Flandre - Gendre forcé de Charles, fut investi du gouvernement du Vermandois jusqu’en 879.

TEUTRICUS (Thierry) (Comte en 879 – mort en 893) - C’est vers cette époque que la ville, déjà pillée par les Normands, en 851 et 859, est de nouveau ruinée par ces pirates qui brûlent l'Église de Saint-Quentin érigée depuis 59 ans seulement. En 885, Thierry fortifie la ville afin de la soustraire aux attaques de ces barbares. Ainsi entourées de murailles, l'antique Augusta et la partie plus moderne bâtie autour de l'Église qui jusqu'alors étaient restées distinctes, sont réunies et confondues dans une seule enceinte, en même temps que cette nouvelle ville, prend le nom moderne de Saint-Quentin.

HERBERT 1er  (Comte en 893 - mort en 902) - Descendant de Charlemagne, d’après la tradition. La transmission devenant héréditaire, il est donc le premier de la lignée des Comtes du Vermandois qui se sont succédés jusqu'en 1214. Dans le contexte des invasions normandes et de l’effondrement du pouvoir royal, les grands vassaux peuvent s’affirmer et constituer de véritables principautés. Les Comtes de Vermandois y occupent une place de premier plan.

HERBERT II (Comte en 902 -  mort en 943) - Grand soldat et fin politique, il atteint une telle puissance qu’il constitue un réel danger pour les Carolingiens. En 931, il rentre en conflit avec Hugues de France et le Roi Raoul. Jusqu’en 937, Saint-Quentin est assiégée 4 fois et change de mains 5 fois. A sa mort, en 943, Raoul de Gouy tente de s’emparer de Saint-Quentin. Il est tué par les quatre fils d’Herbert II, qui se partagent la principauté. A Albert échoit le Vermandois.

ALBERT 1er le Pieux (Comte en 943 - mort en 987) - Quoique laïc, Albert, comme ses prédécesseurs, est revêtu de la qualité d'abbé et tient le premier rang dans l'Église. En 987, Albert est parmi les «grands» de France qui rejettent l’élection d’Hugues Capet. Sous le gouvernement d'Albert sont fondées, vers 944, l'abbaye de Saint-Prix, près Saint-Quentin (plaine de Rocourt) qui, en 1474, sera transférée dans la ville et l'abbaye d'Homblières, en 948. En même temps Albert accorde une charte aux habitants de Saint-Quentin. Par cet acte, que l'on peut regarder comme un véritable événement historique, les Saint-Quentinois ont la franchise des personnes et des biens, et s'appellent dés lors bourgeois. Albert le Pieux meurt en 987, regretté de sa famille et de son peuple.

HERBERT III (Comte en 987 – mort en 1014) - Herbert III, succède à Albert, en 987. Herbert, comme plusieurs comtes, ne parait pas au sacre de Hugues Capet qui s'empare du royaume et de la couronne de France, l'année même où Herbert est comte de Vermandois ; cependant il le sert comme son suzerain. Il n’est nullement guerrier, mais plutôt religieux. L'histoire a peu de faits à relater de son gouvernement. Il meurt en 1014.

ALBERT II (Comte en 1014 – mort en 1038)- Fils et successeur d'Herbert III, on l'appelle comte pendant 7 ans, bien qu'il se soit fait moine en 1018. Après des alternatives d'entrées et de sorties du cloître, il finit par mourir dans la débauche.

OTHON 1er (Comte en 1031 – mort en 1045) - Othon, son frère, lui succède, en 1031. Connu par ses libéralités, il prend pour femme Papia (ou Pavia), fille du duc d'Aquitaine. Othon a 3 fils, et meurt le 25 mai 1045, après un règne de 24 ans. C'est de cette époque que date l'institution des prières solennelles en mémoire des morts.

HERBERT IV (Comte en 1045 – mort en 1081) (voir page spéciale) - Herbert IV succède à son père et épouse Adèle, fille de Raoul, comte de Valois.

ADÉLAÏDE (Comtesse en 1081 – morte en 1124) - Adélaïde (ou Adèle) de Vermandois, succède à son père, du consentement de celui-ci et des principaux seigneurs. Elle épouse Hugues de France, troisième fils de Henri 1er. Hugues guerroie d'abord pour son frère Philippe 1er contre Foulques, puis il prend la croix à Saint-Quentin, en 1095, et part pour la Terre Sainte. Il est (avec Godefroy de Bouillon) un des principaux chefs de la première croisade. Fait prisonnier par Alexis Commène, puis rendu à la liberté, il porte, durant la croisade, le grand étendard, et a sous ses ordres les seigneurs du comté de Vermandois. Revenu en France après la prise de Jérusalem, il se croise de nouveau quelques années plus tard. Blessé dans un combat, Hugues meurt à Tarse en 1101. Adèle gouverne le comté jusqu'à sa mort, en 1124.

RAOUL 1er le Grand ou le Borgne (Comte en 1124 - mort en 1152) - Raoul succède à sa mère. Il est le fondateur de la seconde maison de Vermandois. Il perd un œil au combat de Livry, sous Louis-le-Gros, où toute la noblesse de Vermandois combat sous ses ordres. En 1133, en récompense de ses services, il reçoit la dignité de grand sénéchal de France. Il épouse Éléonore, fille de Thibault, comte de Champagne, puis fait casser son mariage par les évêques de Senlis, de Noyon et de Laon, afin d'épouser Adélaïde de Guyenne, sœur de la reine. Mais Thibault le fait excommunier, ce qui amène une guerre qui met le pays à feu et a sang. Raoul meurt à Crépy, en 1152, après avoir eu 3 enfants de sa femme Adélaïde de Guyenne, un fils nommé Raoul qui lui succèdera, et deux filles, Élisabeth, et Eléonore. C’est le plus grand et le plus illustre de tous les comtes qui ont gouverné le Vermandois.

RAOUL II le Jeune ( Comte en 1152 – mort en 1167) - Raoul succède à son père, sous la tutelle de Yves de Nesle, seigneur connu par sa sagesse et sa probité. Né avec des infirmités qui lui ont fait donner le surnom de lépreux, Raoul a besoin d'un régent, car il végète plutôt qu’il ne vit jusqu'à l'âge de 17 ans. Il meurt en 1167, dans son château de Crépy.

ÉLISABETH (Comtesse en 1167 – morte en 1182) - Élisabeth, sœur aînée de Raoul II, épouse de Philippe d'Alsace, Comte de Flandre. Ils font des concessions de communes à prix d'argent. Philippe renonce à la qualité d'Abbé, jusqu'alors liée à celle de comte. Ami de saint Bernard et de Louis VII, il se croise en 1176 et assiste au sacre de Philippe Auguste, dont il est le parrain. Élisabeth meurt à Arras en 1182, sans héritier et lègue le Vermandois à son époux. En 1179, Philippe réprime très durement la révolte des Saint-Quentinois.

PHILIPPE D’ALSACE (Comte en 1182 – mort en 1191) - La légitimité de Philippe est contestée par la sœur d’Élisabeth, Eléonore. Cette dernière obtient par transaction le Valois. Elle ne récupèrera le Vermandois qu’à la mort de Philippe, en 1191.

ÉLÉONORE (Comtesse en 1191 – morte en 1214) (voir page spéciale) - Elle fait confirmer par Philippe Auguste la Charte de la Commune. Quoique mariée plusieurs fois, elle ne laisse pas d'enfant, et à sa mort (1214) Philippe Auguste fait rentrer ce comté sous sa domination.

La dynastie des comtes du Vermandois s’éteint ainsi par le défaut d’héritiers directs. Le Vermandois est réunit au domaine de la couronne de France. Cette réunion est fêtée au milieu des cris de la victoire de Bouvines, a laquelle participe activement la milice bourgeoise de Saint-Quentin.

Le souverain est représenté par un vicomte et un prévôt. Saint-Quentin n’est plus la capitale d’une seigneurie mais devient une simple prévôté dépendant du grand bailliage de Vermandois. Elle perd son statut de capitale d’un vaste ensemble géographique allant jusqu’aux portes de l’Amiénois, pour devenir le chef-lieu d’une circonscription proche de l’actuel arrondissement. En revanche, elle jouit des nombreux privilèges accordés aux villes royales (jusqu’à la Révolution de 1789 – Abolition des privilèges).

Herbert IV               

Eléonore               

Philippe-Auguste